...S’assemble...
...Dit-on, mais là, dans notre cas le dicton ne fonctionne pas, car dans nos assemblages on va plutôt rechercher un métissage, en allant chercher les différentes qualités et richesses des cuvées en notre possession !
Les assemblages, j’en avais déjà fait, je crois, une tartine dessus l’an dernier, je vous fais grâce de la "réédition deluxe". Si vous voulez vous rafraîchir la mémoire, l’article doit toujours être disponible par ici.
Les derniers jours de 2019 (qui sont d’ailleurs des jours de hautes pressions atmosphériques, ça, j’en parlais ici !) auront été pour nous l’occasion de faire nos premiers assemblages de cuvées. Jusqu’ici, les cuvées ont fermenté telles qu’elles depuis le pressage. Les premières, pressées au mois d’octobre ont presque 3 mois de fermentation derrière elles, et sont arrivées à des densités proches de l’idéal pour les mises en bouteilles.
C’est le moment que nous choisissons pour déguster autour d’une table les cuvées une à une, noter leurs caractéristiques, qualités, et éventuels défauts.
Pour assembler il faut :
- avoir le palais ouvert et les papilles prêtes (pas de café-clope au petit-déjeuner !)
- des verres à dégustation (3 par personne c’est bien, pour pouvoir comparer)
- des crachoirs (parce que quand même une quinzaine de cuvées à goûter dès le matin, bon...)
- de l’eau pour rincer les verres et la bouche entre chaque échantillon
- du pain pour manger et "gommer" les tanins ou l’astringence d’un cidre sur le palais
- un fichier excel de compèt’
- des éprouvettes graduées et des béchers pour faire les mélanges
- être plusieurs pour comparer les ressentis
- savoir ce que l’on veut pour, au final, définir l’assemblage !
La journée commence par une prise d’échantillon de chaque cuve en cave. On amène ensuite ces bouteilles dans la salle de dégustation (ne vous laissez pas berner par le terme "salle de dégustation", parce que ça fait pro, mais en fait c’est la table de la cuisine...) pour les réchauffer, les mettre à température ambiante. Les arômes et saveurs se révèlent plus facilement entre 15 et 20°C qu’à une température plus fraîche (c’est d’ailleurs parfois l’occasion de belles surprises, une cuvée goûtée dans la fraîcheur de la cave ou à la température de la maison pourra s’avérer très différente au nez et au palais !).
Puis on déguste, toujours dans cet ordre :
- la robe d’abord : la couleur, la limpidité. Ce matin les cidres présentaient de belles robes orangées, voire ambrées, typiques des cidres cornouaillais. Une cuvée faite essentiellement de pommes acidulées avait quant à elle l’éclatant d’un jaune paille.
- le nez ensuite : le 1er nez, les arômes de prime abord ; puis le second nez après avoir remué le cidre lentement dans le verre, parfois les arômes se confirment, se renforcent, parfois d’autres arômes apparaissent après ce "berçage".
Les mots entendus ce matin : fruité, anisé, miel, vanillé, banane, bonbon anglais, caramel, agrumes, abricot, poire, pomme verte (quand même !!...), beurre, floral.
- la bouche enfin : on prend le temps de bien faire circuler le cidre dans tous les recoins de sa bouche, pour en apprécier les saveurs : acidité, amertume, astringence ; l’attaque, le corps, la longueur en bouche, ou la persistance seront notées et décrites. #tanins, #souplesse, #amertume, #acidulée, #douceur, #légère astringence...
Les cuvées dégustées étant chacune à un moment différent de leur fermentation (des cuvées sont encore très sucrées, d’autres seraient presque prêtes à être mises en bouteilles), on commence toujours par la cuvée la plus pauvre en sucre, pour aller vers la plus "ronde", la plus sucrée. La sucrosité a tendance à contrebalancer voire à masquer la présence de certaines saveurs (l’amertume notamment) , il est difficile de déceler le potentiel d’une cuvée quand celle-ci est encore trop sucrée (au delà d’une densité de 1030 (soit environ 60g/L de sucre résiduel).
Quand toutes les cuvées ont été dégustées, encensées ou critiquées, recrachées, redégustées, (re-recrachées ?...), on reprend son papier, son crayon, son tableur excel, et on tente de placer et faire correspondre ces 15 cuvées à nos trois ou quatre cuvées d’assemblage voulues au final (Fleur de l’Aber, Finisterrae, Soñj, Fleur de l’Aber extra-sec), en fonction bien sûr des volumes voulus pour chaque cuvée d’assemblages et des volumes disponibles dans les cuvées "de base".
Petit moment de chauffe des cerveaux avant de pouvoir dégager une première proposition. Ce matin, nous n’avons assemblé que pour trois cuvées :
- Fleur de l’Aber
- Finisterrae
- Fleur de l’Aber extra-sec
Le Soñj sera assemblé dans un second temps
La cuvée de la presqu’île ne sera pas assemblée, elle restera une cuvée spéciale ! Nous l’avons cependant goûtée, et l’avons trouvé très prometteuse, étonnante, comme prévue : unique en son genre !
Ce matin, la première proposition aura été la bonne, pas besoin de revoir notre copie, nous sommes tombés d’accord tout de suite et avons validé ces assemblages ; ils laissent augurer un Fleur de l’Aber sec comme on le connait, floral au nez, présentant des notes anisées et caramel, avec une bel équilibre des saveurs, et une longueur en bouche qui en font "un vrai brut " comme on dit !
Le Finisterrae reste fidèle à son équilibre sucre/amertume, avec peut-être cette année une complexité et une puissance aromatique qui pourrait en faire une très belle cuvée. Nous avons déjà hâte de le déguster pétillant dans quelques mois.
Le Fleur de l’aber extra-sec sera un cidre pauvre en sucres, qui devrait révéler de belles notes acidulées une fois sa prise de mousse en bouteille effectuée, pour peut-être s’accorder de façon optimale avec les fruits de mer et poissons ?
Nous étions cinq autour de la table ce matin : 4 "Rozavern" (Jen, Mylène, Fabrice, Nico), une œnologue (Valérie)... Plus un petit Clair qui nous regardait du coin de l’œil entre deux siestes...
Vos commentaires
# Le 31 décembre 2019 à 12:37, par André Potier En réponse à : Qui se ressemble...
Merci pour ce long développement très instructif...
Toujours passionnant de découvrir les facettes du métier qui est le vôtre.
Bonne année à vous tous et bienvenue à Clair !
# Le 1er janvier 2020 à 13:23, par Nico En réponse à : Qui se ressemble...
Merci ! Bonne année aussi et à bientôt !
# Le 7 janvier 2020 à 17:33, par Christophe et Sophie Bergot En réponse à : Qui se ressemble...
Bonjour Jennifer et Nicolas, nous vous souhaitons une très belle année 2020 avec d’excellents produits comme vous savez faire. Nous en profitons pour souhaiter la bienvenue à votre petit Clair ! 👶. A bientôt, Christophe et Sophie de La Halte de Coat Carrec.
# Le 8 janvier 2020 à 09:03, par Nico En réponse à : Qui se ressemble...
Bonjour, un grand Merci ! Meilleurs vœux également !
à Bientôt
Nico- Jen
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